Durant la seconde guerre mondiale de 1939 à 1945, le Canada est devenu la prison britannique de plusieurs centaines de milliers de soldats allemands et italiens. Identifié comme PoW (prisonner of War= prisonnier de guerre), les militaires allemands sont pris en charge par le gouvernement canadien, qui va répartir les prisonniers par catégories de «dangerosité» dans plusieurs provinces.
De nombreux soldats et officiers allemands sont répartis dans des camps de travail et de rétention à travers le pays. Plusieurs tentatives d’évasion et quelques révoltes importantes, comme celle de Bowanville en Ontario, vont pimenter la vie monotone des camps de prisonnier militaire.LaurentBusseau2005
La municipalité de Farnham, dans les Cantons de l’Est, est devenue une zone militaire sous haute surveillance, à cause de la présence discrète d’un camp de prisonniers allemands. Ouvert en octobre 1940, ce camp se trouvait sur le terrain de la station expérimentale de la Dominion. Des officiers de renseignements militaires d’Ottawa étaient en charge de trouver des réseaux nazis au sein des prisonniers. Sur 1098 prisonniers allemands répertoriés au Québec, Farnham comptait environ 200 prisonniers, principalement composé d’officiers militaire du IIIe Reich. Ouvert dès 1940, le camp spécial de Farnham n’était pas un endroit de salubrité exemplaire pour ces nouveaux occupants.
De nombreuses plaintes vont parvenir au Consul de Suisse et à la Croix Rouge, à l’exemple de cet officier allemand qui leur écrit «Le camp de Farnham par sa laideur et son manque d’aménagement, est déprimant au plus haut point». Conscient de cette vétusté précaire, les autorités canadiennes vont peu à peu améliorer l’organisation pénitentiaire de Farnham.LaurentBusseau2005
Jusqu’à sa fermeture en mai 1946, le camp va commencer à fournir de la main-d’œuvre germanique aux pomiculteurs québécois des environs. Cette main-d’œuvre bon marché fournit gracieusement par l’armée canadienne, a marqué les esprits des fermiers de l’Estrie. Bon travailleur et bien discipliné, la plupart des officiers allemands étaient envoyés dans les fermes sur une base volontaire, où selon la convention de Genève, Ils devaient être logés, nourris et rémunérés de 50 cents par jour.
Sous la responsabilité des agriculteurs locaux et contraint par un couvre-feu strict, les prisonniers d’origine allemande et autrichienne ont parfois laissé une forte impression de respect et de sympathie parmi leurs nouveaux gardiens des Cantons de l’Est. Sous l’uniforme militaire, on retrouvait des professeurs d’université, des ingénieurs, des marins, mais également quelques descendants de la vieille noblesse prussienne.LaurentBusseau2005
Beaucoup de ces soldats parlaient un très bon français, au grand étonnement de leurs hôtes francophones, mais aussi au déplaisir des autorités militaires canadiennes, qui ne pouvaient communiquer qu’en anglais avec les prisonniers de guerre, grâce à un interprète souvent allemand. Paradoxalement, les pomiculteurs de la région ont souvent eu recours à ces lointains saisonniers, pour combler le manque de main-d’œuvre des hommes partis en Europe faire la guerre à l’Allemagne Nazie.
Pour mieux comprendre toute l’ambiguïté des rapports entre les prisonniers allemands et les fermiers québécois, qui les ont accueillis et gardés jusqu’à leur départ pour l’Allemagne en 1946, à voir le film québécois de 1994, « La vie d’un Héros», de la réalisatrice et comédienne Micheline Lanctôt. Ce film offre un témoignage vivant sur cette épisode historique des Cantons de l’Est.
par Laurent Busseau copyriht 2005
source bibiographique :
Bernard, Yves, Trop loin de Berlin : des prisonniers allemands au Canada 1940-1946, Septentrion, 1995.
Référence archives canadiennes www.anc.gc.ca
source web de Radio-Canada archives de Radio-Canada
-30-